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Il y a quelques semaines, Alfa Romeo France m’a contacté pour me demander si j’étais intéressé à participer à une course de 24 heures sur le mythique circuit d’Hockenheim, en Allemagne. J’ai bien sûr répondu positivement, et la course s’est déroulée les 15 et 16 février 2025. C’était pour moi l’occasion de vivre l’expérience d’une course de 24 heures, mais aussi de tester la version 156 ch électrique du Junior dans des conditions de compétition. J’en ai également profité pour la comparer avec la version 280 ch électrique que j’avais essayée sur le circuit de Balocco, en Italie.
Tout d’abord, la compétition s’appelle l’ADAC e-competition, une course organisée tous les ans par l’ADAC depuis février 2022. L’ADAC est une puissante association allemande spécialisée dans l’automobile, qui compte plus de 21 millions de membres et dont la mission est « de sauvegarder et de promouvoir les intérêts de l’automobilisme et du sport motorisé ». Pour l’édition 2025, pas moins de 31 voitures étaient engagées, avec des modèles comme la Tesla Model 3, la Kia EV3, la Kia EV6, la Renault 5, la Skoda Elroq, la Hyundai Ioniq, la Volkswagen e-Golf, la Lucid Air, la Xpeng et même une Porsche 911 retrofit. Ces voitures étaient pilotées par des conducteurs qui n’en étaient pas à leur première participation.
Bref, une course organisée très sérieusement, sur un circuit emblématique de la compétition automobile : le Hockenheimring, en configuration GP, comme à l’époque de la Formule 1. Alfa Romeo France était la seule équipe étrangère à participer : des Français, au volant d’une marque italienne, sur un circuit allemand ! Pour gagner, il faut bien sûr être le premier (au classement général et/ou dans sa catégorie) et donc trouver le compromis entre vitesse et consommation.
Nous voilà partis de Paris avec les deux Alfa Romeo Junior pour nous rendre à Hockenheim, sur un trajet d’environ 600 km, par des températures comprises entre 5 °C et -1 °C. En roulant à 120/130 km/h tout au long du parcours, il a fallu pas moins de trois charges pour arriver, voire quatre si l’on compte celle du départ et si l’on considère qu’une fois sur place, la batterie est presque vide et nécessite encore d’être rechargée. Deux de ces charges ont été effectuées sur l’autoroute.
La consommation s’est établie autour de 20 kWh/100km, pour une batterie de 51 kWh. La puissance relevée sur les superchargeurs était d’environ 105 kW, avec des arrêts de 20 à 30 minutes chacun. La première charge sur autoroute a eu lieu pendant la pause déjeuner, et la seconde a permis de faire une pause au bout de deux heures de route.
Il ne faut cependant pas oublier que quatre recharges de 30 minutes représentent déjà deux heures de charge au total. Il est donc nécessaire de s’organiser pour en limiter l’impact sur le trajet. En prévoyant une charge avant le départ, deux pendant le trajet et une à l’arrivée, on peut n’« avoir à subir » qu’une heure de charge sur autoroute (dont une demi-heure pendant la pause repas). Mais oui, cela demande plus d’organisation et de patience qu’avec une voiture thermique, qui ne requiert pas ce type de planification.
Passée la frontière allemande, nous n’avons pas pu nous empêcher d’essayer la vitesse maximale du Junior 156 ch : 151 km/h. Pas de quoi suivre l’Alfa Romeo 4C qui nous a doublés sur l’autoroute allemande. Nous sommes arrivés le vendredi soir à Hockenheim, par une température d’environ 1 °C, et nous avons dormi dans un hôtel situé à quelques minutes du circuit.
Le lendemain matin, la température n’est pas plus élevée et nous prenons la direction du Hockenheimring. Nous arrivons par l’arrière du circuit et accédons directement au paddock. Ce n’est qu’en traversant le paddock pour me rendre dans la voie des stands que je me rends compte de la puissance du lieu. Il est impressionnant de voir l’immensité des tribunes depuis les stands, et de pouvoir marcher sur la ligne de départ qui a accueilli des F1 et bien d’autres compétitions. L’ADAC e-competition est peut-être une « petite » course, mais l’endroit donne à l’événement un caractère très sérieux.
La journée du samedi se déroulera ainsi : repérage de la piste avec quelques tours en voiture, essais libres pour évaluer la meilleure stratégie, mise en grille à 15 h 30, puis départ de la course de 24 heures à partir de 16 heures. Pour éviter tout problème, car nous sommes tout de même 31 voitures au départ, avec des pilotes amateurs, il est interdit de dépasser lors du premier tour.
Concernant notre équipe de deux voitures (numéro 21 et 22), il était essentiel d’adopter une stratégie décalée. En effet, la règle imposait un seul chargeur pour deux voitures, avec une puissance maximale de 19 kW. Nous avons donc décidé de tester deux approches : l’une avec une consommation cible de 18 kWh/100 km, et l’autre de 19 kWh/100 km. Ainsi, une voiture irait plus vite sur 24 heures, mais consommerait davantage, tandis que l’autre roulerait un peu moins vite mais consommerait moins. À noter qu’avec une puissance de 19 kW, il fallait compter environ une heure et demie pour charger jusqu’à 90 %.
Le départ est donné à 16 h. Le premier tour se passe bien, sauf que ma voiture, la numéro 21, a effectué malgré elle quelques dépassements lors de ce premier tour, nous valant ainsi une pénalité de huit minutes. Le règlement impose des relais de deux heures maximum. Je serai le second pilote à prendre le volant, vers 19 h 30 (deux heures de relais + une heure et demie de charge).
Me voilà lancé de nuit sur le circuit d’Hockenheim, qui n’est pas éclairé. Je comprends alors ce que vivent les pilotes aux 24 Heures : la concentration requise est intense. On voit des phares loin devant, mais aussi loin derrière. On double et on se fait doubler en pleine nuit, uniquement avec nos feux de croisement. De nuit, la sensation de vitesse est différente.
Il m’aura fallu environ 20 à 30 minutes, sur mes deux heures de roulage, pour prendre mes repères. Ces 20 à 30 minutes paraissent longues, mais une fois à l’aise, l’heure et demie restante procure énormément de plaisir.
Maintenant, nous recherchons la meilleure trajectoire et le meilleur chrono, tout en respectant une consommation cible. Cela signifie : ne presque jamais freiner ! Le défi consiste à maintenir autant que possible une vitesse stable, aussi bien en ligne droite qu’en virage. L’Alfa Romeo Junior a donc été poussée au maximum de ses capacités par chacun des pilotes… et elle n’a pas démérité.
Tous les pilotes de l’équipe se sont accordés à dire que la Junior est très bonne sur circuit. Nous avons tous eu la sensation d’entrer et de sortir des virages plus rapidement que les autres voitures. La vitesse en ligne droite ne comptait pas vraiment, chacun appliquant sa propre stratégie de consommation. En revanche, la partie technique du Hockenheimring jouait en notre faveur. Il est vrai que parcourir plusieurs fois ce secteur technique en jeu vidéo peut être lassant, mais au volant de la Junior, après quelques tours, c’était à chaque fois un réel plaisir !
Tour après tour, je cherchais la meilleure trajectoire pour aborder de plus en plus rapidement le virage 6, puis le virage 9. Quel plaisir ! J’arrivais à 90 km/h, levais le pied pour entrer à 80 km/h, et ressortais à 70 km/h. Le Junior se débrouille donc très bien dans ces conditions.
C’est également dans ces moments que j’ai pu comprendre tout l’intérêt du différentiel Torsen, présent dans la version 280 ch du Junior, mais absent dans la 156 ch. Autant, avec le modèle de 280 ch, on peut arriver très vite et tout de même contrôler la trajectoire, autant dans la 156 ch sans différentiel Torsen, si l’on arrive trop vite, on sous-vire et on sort de la piste. J’aurais aimé disposer du différentiel Torsen à glissement limité sur la 156 ch pour comparer mes trajectoires et mes chronos.
Bien sûr, on pourrait rétorquer qu’une Peugeot e-2008 ou une Opel e-Corsa, qui partagent la même plateforme eCMP, auraient donné des résultats similaires. Peut-être, mais en tout cas, grâce à sa direction précise et au réglage de son châssis, l’Alfa Romeo Junior me semblait supérieure à toutes ses concurrentes dans la partie technique du Hockenheimring.
Mon relais s’est terminé vers 21 h 30. J’ai alors regardé mes deux coéquipiers rouler une bonne partie de la nuit, le tout accompagné de musique techno allemande dans la salle légèrement chauffée où les chronos étaient affichés, et sous une température qui est descendue jusqu’à -1 °C dans notre paddock.
Vers 4 h, les deux autres coéquipiers, qui avaient dormi de 23 h à 3 h 30, sont arrivés pour prendre le relais. Après avoir échangé les informations nécessaires pour la suite de la course, nous sommes allés nous coucher vers 5 h, avant de revenir sur le circuit aux alentours de 10 h.
Surprise ! À mon réveil, la neige était déjà bien installée ! L’équipe de nuit avait donc dû piloter dans la pénombre et la poudreuse. Ce sont les aléas de la météo !
Tout se passe sans encombre, et mon deuxième relais aura lieu de 12 h à 14 h. En pleine journée, je prends beaucoup de plaisir sur un circuit d’abord humide, mais qui sèche au fil des tours. Je cherche constamment à réaliser le meilleur temps, avec une consommation maîtrisée, et donc en freinant le moins possible… L’Alfa Romeo Junior n’aura jamais fait défaut pendant ces 24 heures.
Le drapeau à damier est brandi à 16 h. Au classement général, ce sont deux Tesla Model 3 et une Hyundai Ioniq 6 qui l’emportent, grâce, il faut le dire, à leur grosse batterie. Après 24 heures de course, l’Alfa Romeo Junior numéro 22 termine à 55 km du leader, soit environ douze tours de retard. C’est pour cette raison qu’il existe différentes catégories. Dans celle des Alfa Romeo Junior, la catégorie B, nous terminons premier et troisième (ma voiture).
Après analyse, la pénalité de huit minutes n’a évidemment pas aidé, et rouler un peu moins vite pour économiser la batterie n’était pas la meilleure solution.
Au final, que l’on aime ou non les voitures électriques, cette course a été un moment exceptionnel. Rouler sur le circuit d’Hockenheim pendant 24 heures, de jour comme de nuit, avec les aléas de la météo (notamment la neige), ajuster la stratégie en équipe à chaque relais, gérer la fatigue… c’est une expérience unique à vivre.
L’Alfa Romeo Junior s’est révélée irréprochable durant ces 24 heures (et plus). J’avais d’ailleurs une appréhension quant au confort des sièges baquets Sabelt, mais je peux témoigner qu’après tout ce temps passé derrière le volant, je n’ai ressenti aucune douleur ! Au total, l’Alfa Romeo Junior aura parcouru quasiment 2 500 kilomètres en un seul week-end.
Je remercie Alfa Romeo France pour l’invitation, mes coéquipiers Andy, Jean-Baptiste, Soufyane, Clément (voiture 21), Alexandre, Émilien et Artur (voiture 22), Yohann le photographe, ainsi que toute l’organisation de l’ADAC e-competition pour leur accueil.
Bonjour,
Vous avez changé de monture ?
Il me semblait que vous deviez y participer avec une Lancia Ypsilon ?
Cordialement.
Bonjour, bien vu… les deux Lancia Ypsilon ont eu un souci technique au départ, donc plan B de le faire avec les Alfa